Arvalis a testé pendant deux mois à l’automne 2019 le système de clôtures virtuelles Nofence à la ferme expérimentale de Saint-Hilaire-en-Woëvre (Meuse), sur une dizaine de génisses charolaises âgées d’un à deux ans. Ce printemps va démarrer un véritable essai scientifique dans le réseau des Digifermes.
La start-up norvégienne Nofence propose depuis quelques années un système de clôtures virtuelles, initialement conçu pour les caprins et adapté pour les bovins. Il consiste en des colliers à poser sur tous les animaux d’un lot, équipés d’un GPS ainsi que de panneaux solaires assurant la charge de leur batterie. Une application web permet de définir la zone dans laquelle on veut maintenir ce lot d’animaux.
Quand l’un des animaux approche de la limite virtuelle, un signal sonore avec une intensité croissante est émis. Quand il franchit la limite, un signal électrique lui est transmis via le collier. Sur l’application, on peut suivre les déplacements de chaque animal et l’historique des alertes sonores et électriques.
Le coût indicatif est actuellement de 300 euros par collier (pour une durée de vie de huit à dix ans). L’abonnement est de 30 à 60 centimes par jour et par animal – un coût relativement élevé pour l’instant, à voir si à l’avenir il sera réduit si cet équipement, qui est encore expérimental se développe.
« Nous avons testé de mi-septembre à mi-novembre le système sur un lot de onze génisses charolaises âgées d’un à deux ans » a expliqué Didier Deleau, ingénieur régional fourrages Arvalis à la station expérimentale Arvalis-Institut du végétal de Saint-Hilaire-en-Woëvre, lors d’un webinaire organisé le 30 avril par le réseau Arvalis des Digifermes. Le paddock était clôturé normalement sur trois côtés, et la clôture virtuelle en fermait le quatrième côté.
Un apprentissage très progressif a été organisé, sur trois semaines. D’abord le paddock était clôturé physiquement normalement au niveau de la limite virtuelle programmée. Progressivement, la clôture physique a été éloignée de la limite virtuelle (de 15 mètres, puis 30 mètres). Elle a ensuite été déposée au sol, puis enlevée, avant que les piquets ne soient eux-aussi retirés.
« Les développeurs du système nous ont cependant assuré que la période d’apprentissage peut se mener en une dizaine de jours pour des bovins » précise Didier Deleau.
Cela a fonctionné : les génisses sont systématiquement retournées dans le périmètre qui leur était attribué en cas de franchissement de la limite virtuelle. Un comportement propre à chaque animal été mis en évidence grâce au suivi individuel permis par l’application. Une ou deux génisses du lot ont beaucoup plus testé la limite que leurs copines…
« Le signal sonore n’est pas du tout stressant a priori pour les animaux. Il est de l’ordre de 40 décibels, beaucoup moins fort que celui d’une cloche par exemple » observe Didier Deleau. En Norvège et en Australie, des études d’impact sur le bien-être animal ont été menées avant que de tels dispositifs ne soient commercialisés.
Ce printemps va démarrer un véritable essai scientifique dans le réseau des Digifermes. Il devrait permettre de répondre à certaines questions que suscite cet équipement. Pour ce qui concerne l’élevage allaitant, il sera mené à la ferme des Etablières en Vendée et à la ferme de Saint-Hilaire-en-Woëvre (avec un volet bovins laitiers à Derval en Loire-atlantique et un volet ovins viande au Mourier en Haute-Vienne).
Cet essai comparera les résultats de génisses âgées d’un à deux ans, dont un lot sera avec conduit avec des clôtures classiques et un lot avec le système Nofence, pendant qu’elles pâturent en système tournant simplifié (changement de paddock tous les cinq à sept jours). L’activité des animaux au pâturage (ingestion, rumination, repos…) sera mesurée à partir de colliers « accéléromètres ». Les performances des animaux au pâturage (GMQ) seront calculées. Il sera aussi testé la capacité de recharge du collier par ses panneaux solaires, notamment à l’automne.
L’application ouvre un certain nombre de possibilités pour le comportement des animaux au pré (exploration de la parcelle pendant le pâturage, suspicion de maladie quand le comportement change, présence de prédateurs…)
Par contre, une étude menée en 2015 en Irlande, à la ferme expérimentale de Moorepark avec un système analogue de clôture virtuelle, a montré que le temps passé à pâturer était, en phase d’apprentissage, pour des génisses laitières, nettement réduit avec une clôture virtuelle. Et le temps qu’elles passaient debout et inactives était beaucoup plus important qu’avec des clôtures classiques. « Il faudrait savoir si ce changement de comportement persiste quand les animaux sont censés être habitués au dispositif » explique Didier Deleau.
La question qui se pose aussi est celle du temps de retour au système de l’information dans le cas où un animal se déplace très rapidement. Il serait aussi intéressant de savoir si le fonctionnement est bon quand un important couvert d’arbres ou de haies peut gêner le GPS.
Il existe un système australien qui fonctionne sur le même principe : eShepherd Virtual Fence de AgerSens et CSIRO.
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